EFFICACITE OPERATIONNELLE ET PLAN STRATEGIQUE DES STRUCTURES VETERINAIRES

2ème Partie : Le plan stratégique comme source de plaisir et d’efficacité économique

1. La stratégie d’innovation ou de différenciation

Elle consiste à décider, à choisir délibérément, en quoi mon offre sera durablement différente de mes concurrents. L’objectif est d’obtenir, grâce à la vision à long terme et la formalisation du plan stratégique, une position unique et précieuse sur un marché, pour les années futures.

Idéalement le nouveau segment de marché aura une taille la plus grande possible pour valoriser au mieux ma différenciation par le nombre. Il est cependant possible de bâtir des stratégies de différenciation sur des plus petits marchés, les stratégies « de niche », où la rentabilité sera atteinte par la valeur ajoutée et non par le nombre.

Pour se différencier, il est possible soit d’effectuer des activités ou des services qui n’existent pas aujourd’hui sur le marché – et qui correspondent à un besoin chez le consommateur – (innovation grâce à un nouveau médicament ou un nouveau dispositif médical), soit d’effectuer différemment une activité déjà existante (banque en ligne, Uber et le transport de personnes, …).

Le plan stratégique s’inscrit dans la durée car certaines actions vont demander du temps, et des ressources pour porter leurs fruits. Il en va ainsi par exemple, pour créer l’offre ou les produits eux-mêmes, pour les amener sur le marché ou les faire connaitre aux clients, ou même pour qu’ils deviennent une activité rentable. La définition de la stratégie exige des dirigeants, de prendre des décisions claires et d’en assumer la responsabilité, de faire des arbitrages qui engagent fortement l’entreprise pour des années. La définition de la stratégie est donc un exercice bien plus engageant et complexe que la recherche de l’efficacité opérationnelle.

L’environnement concurrentiel changeant très rapidement, il convient de se laisser des marges de manœuvre, pour garder une certaine souplesse et une certaine capacité d’adaptation. Il ne s’agit pas d’une remise en cause de la stratégie globale qui se doit de rester la feuille de route, mais d’ajustements tactiques pour s’adapter aux opportunités nouvelles.

Bien sûr toute position enviable sur un marché va pousser la concurrence à imiter la solution proposée. C’est inévitable et même si cela peut paraître injuste, le chef d’entreprise doit s’y résoudre. Mieux ! Il peut considérer cela comme un succès, car cela est toujours le signe d’une réussite, la preuve que la solution imaginée et proposée était réellement une innovation et a apporté de la valeur. Cela place aussi l’entreprise en position de leader reconnu sur le marché. L’objectif est donc d’être imaginatif et ambitieux dès le départ du plan stratégique pour creuser le plus grand fossé possible par rapport à ses concurrents, ou pour imaginer plusieurs activités différenciantes ou plusieurs innovations successives, et retarder au maximum la convergence concurrentielle.

Cette stratégie de différenciation va permettre de sortir, au moins pendant un certain temps, de la bagarre autour de l’efficacité opérationnelle. Elle permettra donc de générer des bénéfices qui pourront être partagés avec les salariés ou qui pourront permettre d’investir pour développer de nouvelles activités ou de créer de nouveaux marchés. Elle est exigeante dans sa conception et dans sa mise en œuvre, car elle impose bien souvent à tous de sortir de sa zone de confort, de changer sa façon de travailler, de faire autre chose ou de le faire différemment. Elle nécessite alors un accompagnement des salariés, une obligation de les impliquer dans les décisions opérationnelles, ou de communiquer très régulièrement avec eux. Mais bien conduite, non brutale, et en particulier si elle est génétiquement gravée dans l’ADN de l’entreprise, la stratégie de différenciation est particulièrement motivante et impliquante pour l’ensemble des salariés de l’entreprise.


Schéma 2 : L’efficacité opérationnelle à l’épreuve du temps


Schéma 3 : la dynamique générée par le plan stratégique et les conséquences

2. Le plan stratégique de développement comme base de l’efficacité et du plaisir dans l’entreprise

Les deux conditions indispensables à la pérennité d’une entreprise sont en premier lieu son efficacité, sa capacité à générer des bénéfices, et en second lieu le plaisir à travailler dans cet environnement. Cette deuxième condition est probablement plus importante qu’il n’y parait, pour que l’entreprise puisse d’une part compter sur des salariés motivés, efficaces, engagés et puisse d’autre part, attirer et garder les talents. La puissance des réseaux sociaux et des médias en fait une caisse de résonnance exceptionnelle quant à l’image, positive ou négative, de l’entreprise. Cette image est ainsi véhiculée et diffusée très largement. Ainsi certaines sociétés confrontées au mal-être au travail ont été particulièrement sous le feu des projecteurs médiatiques ces années. Et à l’opposé, la notion de marque employeur déployée par les entreprises pour séduire et conserver des talents, ou les investissements de certaines sociétés comme Google pour proposer des environnements de travail exceptionnels à ses salariés.

Seul le plan stratégique permet de remplir durablement ces deux conditions essentielles, efficacité et plaisir. En effet, les collaborateurs sont impliqués dans la conception et dans le déploiement du plan stratégique, ce qui leur permet de mieux comprendre les menaces et les opportunités de leur environnement, de comprendre les enjeux, et les raisons d’une telle évolution. Le plan stratégique est décliné en projets, dans lesquels ils sont intégrés et responsabilisés, ce qui leur permet d’acquérir de nouvelles compétences, et de renforcer le travail en équipe. Ils sont dans l’action, en charge de façonner leur entreprise future dans une représentation positive. Ils y trouvent donc une source de motivation, une énergie positive. Le plan stratégique s’inscrit ainsi dans un cercle vertueux de la transformation raisonnée. Il est synonyme, aussi bien en interne (salariés) qu’en externe (clients), d’amélioration, de satisfaction, de prise de hauteur, et donne le sentiment de participer à une aventure. Il est aussi, et ce n’est pas un moindre bénéfice, une force d’attraction pour les employés extérieurs à l’entreprise.

Il n’est d’ailleurs pas anodin de constater que plus l’efficacité opérationnelle, tournée uniquement vers l’interne, supplante la stratégie, plus les salariés des entreprises sont en manque de sens dans leur travail quotidien.

Ainsi la stratégie permet de se poser la question « comment faire mieux pour nos clients ? » alors que l’efficacité opérationnelle pousse à répondre à « comment faire pareil en moins cher ? » avec l’impact immédiat sur la moindre motivation des collaborateurs.

Pierre MATHEVET, consultant TIRSEV.